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Photo du rédacteurJacques Abécassis

L’accompagnement : A quoi ça sert ?


L’accompagnement : A quoi ça sert ?

Une réponse par induction à partir d’une pratique

L’accompagnement entre dans les mœurs, de plus en plus d’entreprises et de particuliers font appel aux services de coachs. Les séminaires et les articles des médias sur le sujet informent et alimentent les doutes et les espoirs. Les personnes et les entreprises qui n’ont pas l’expérience de ce type de prestations posent souvent une question simple et légitime : « l’accompagnement, à quoi ça sert ? ».

L’accompagnement n’est pas une pratique uniforme, même si certains professionnels organisent des regroupements et mettent au point des standards. Les pratiques restent assez diverses selon l’histoire de l’accompagnant, sa formation, son expérience professionnelle, le temps durant lequel il aura frotté ses certitudes contre la « vraie vie ». Elles varient aussi en fonction des bénéficiaires habituels de son accompagnement et du cadre institutionnel de délivrance de ses prestations. Aussi, pour dire « à quoi ça sert », je partirai de ma pratique. Sans prétendre à l’exhaustivité, mais pour être un peu concret, je dirai comme témoin « à quoi ça a déjà servi ».

A se développer professionnellement, pour réussir avec les autres

Les personnes que j’accompagne depuis 1986 sont généralement âgées de 30 à 55 ans. Ce sont des hommes et des femmes de formation supérieure qui exercent des fonctions commerciales, d’encadrement ou de direction d’entreprise. Ils travaillent notamment dans les secteurs de la banque, de l’industrie, ou de la santé. Généralement, ils ont déjà une bonne compétence technique dans leur métier. Leur accompagnement est financé soit à titre individuel, soit par le biais de leur entreprise. La durée de l’accompagnement varie selon les objectifs visés et des moyens disponibles. Les accompagnements que j’ai menés, en séance individuelle ou en groupe, pour environ 25 000 personnes, se sont déployés sur une durée de six à plusieurs dizaines de séances.

Pendant mon activité libérale, ou depuis 5 ans, dans le cadre de LUCID Conseil & Formation, mes missions d’accompagnement, avaient comme axe principal d’intervention l’amélioration de la relation à soi et aux autres. J’aborde les problématiques professionnelles, qu’il s’agisse de négociation, de management ou de travail en équipe, comme un praticien en psychologie sociale. Ce n’est pas bien sûr une panacée. L’accompagnement par cette voie convient mieux aux clients qui ont déjà acquis une certaine expérience professionnelle. Souvent ils savent quoi faire techniquement, mais ont besoin d’aide pour gérer en temps réel leurs réactions et celles de leurs interlocuteurs, individuellement ou en groupe. J’appelle la mise en œuvre de cette double compétence, technique et relationnelle, « être dans la vraie vie ».

En effet, les techniques et méthodes professionnelles sont souvent enseignées sans tenir compte de la complexité des relations que les vraies personnes entretiennent entre elles. En formation professionnelle continue, par exemple, pour des raisons pratiques (coûts, temps disponible…), les situations professionnelles sont présentées de manière idéale ou en prévoyant seulement quelques réactions stéréotypées. Cela suffit souvent dans un premier temps pour acquérir une certaine expérience technique, ou pour des personnes qui n’auront à les utiliser que dans des cadres relationnels qu’elles connaissent bien, et dans lesquels elles réussissent déjà. Dans ce cas, la personne ne sait pas vraiment comment elle gère la relation, mais cela fonctionne, et elle n’a donc pas besoin de se questionner à ce sujet.

Accompagner en traitant la relation à soi et aux autres est utile quand l’expertise technique du client accompagné, indispensable par ailleurs, ne suffit plus.

C’est souvent le cas aujourd’hui : les clients que nous accompagnons doivent bien connaître leur métier, leurs services, leurs produits, mais aussi être capable de discuter et de négocier avec de nombreux interlocuteurs d’univers et d’origine différents. Chacun de ces acteurs possède l’expertise propre à son métier, à son secteur d’activité, ce qui lui permet, entre autre chose, de faire partie de son groupe professionnel, mais cela l’isole du même coup par la frontière que crée la spécialisation. Chacun transporte aussi les usages et les bonnes mœurs de son milieu social et culturel d’origine. C’est l’honneur de nos Républiques de favoriser le brassage social, culturel, linguistique -et il y a encore beaucoup à faire- mais cela ne va pas sans difficultés interculturelles, au sens large de ce terme. La certitude grandit pourtant qu’il n’y a pas de salut individuel, l’expertise du métier ne suffit plus, et l’accompagnement peut servir à cela : se développer professionnellement pour réussir avec les autres.

A atteindre un but important

L’accompagnement se fait sur un chemin symbolique, d’un point actuel à une situation visée.

Quand j’accompagne quelqu’un, mon rôle consiste à :

· L’aider à fixer son cap ou à en changer,

· L’aider à s’orienter,

· Lui dire ce que je perçois de sa façon de cheminer,

· L’aider à se repérer en cours de route,

· Le guider pendant les étapes difficiles de la route,

· L’encourager quand il trébuche,

· Soutenir son effort pour arriver au but,

· Nous séparer quand il est arrivé.

Accompagner quelqu’un, ce n’est pas :

· Exiger qu’il utilise ma propre carte, qu’il suive le chemin que je lui ai préparé,

· Le juger,

· Être son gourou ou un magicien,

· Ni lui tenir compagnie.

L’accompagnant aide son client à aller puiser dans sa motivation à avancer et à réussir. Il est nécessaire que la motivation existe préalablement à l’intervention de l’accompagnant. De ce point de vue, l’accompagnement sert à atteindre un but suffisamment important pour la personne et son entreprise.

A opérer un changement concret, à passer un cap

Le point commun entre les demandes de mes clients et mes propositions, c’est l’idée de production de changement. C’est ainsi que je conçois cette activité d’accompagnement, et cela correspond également aux attentes exprimées par mes clients.

Dans mon expérience, les demandes de changement sont souvent formulées ainsi :

· Passer du rôle de leader d’une équipe à celui d’animateur,

· Vendre plus ou mieux,

· Devenir un manager-coach pour un manager-expert,

· Gérer une situation professionnelle difficile,

· Négocier dans un moment délicat,

· Réussir dans une nouvelle fonction,

· Investir toute l’amplitude de ses fonctions.

L’accompagnement sert alors à aider le client à passer un cap personnel ou professionnel.

A avoir un témoin neutre pour s’observer, observer les autres et la situation

Comme je le dis plus haut, mes clients n’ont habituellement pas de souci majeur avec les techniques. Ils savent comment vendre, comment mener un entretien de management, comment régler une difficulté relationnelle. L’intervention de l’accompagnant consiste plutôt à les aider à savoir ce qu’ils font et ne font pas, puis à faire ce qu’ils savent au moment opportun. Accompagner demande alors une certaine neutralité et une absence relative de projet de l’accompagnant sur l’accompagné.

Révéler ou restaurer la pleine possession de sa puissance de décision et d’action

Pour les personnes que j’ai accompagnées, faire ce qu’elles savent au moment opportun, n’est que rarement une simple question de volonté. Elles veulent, mais ne parviennent pas assez systématiquement à leur goût à transformer cette volonté en action adéquate au moment opportun. Nous travaillons alors sur ce qui va révéler ou restaurer la pleine possession de leur puissance de décision et d’action.

Si ces détours ne sont pas l’objectif final, on pourrait dire que l’accompagnement sert aussi à cela :

· Faire un diagnostic de la situation,

· Trouver les marges de manœuvre qui permettent de concilier choix et désirs personnels avec les possibilités de l’environnement personnel et ou professionnel,

· Élaborer une représentation acceptable par la personne et son environnement qui lui permette de produire un changement mutuellement souhaité,

· Lever les blocages personnels,

· Oser être soi-même,

· Être plus heureux,

· Sortir de la passivité et assumer ses responsabilités, passer à l’action,

· Améliorer sa ténacité, sa persévérance,

· Être capable de parler de soi tel qu’on se perçoit et pas tel qu’on voudrait être perçu,

· Être capable de parler des autres comme on les perçoit,

· Accepter et gérer les tensions et les conflits,

· Équilibrer les rapports de force.

En résumé, et sans être exhaustif, l’accompagnement sert à révéler ou à restaurer la pleine possession de la puissance de décision et d’action d’une personne ou d’un groupe, quand le but à atteindre est important, quand cela nécessite un changement actif et significatif, et que la présence d’un témoin neutre est nécessaire.

Mais la question « à quoi sert l’accompagnement ? » en cache parfois une autre : « est-ce que cela pourrait me servir, à moi ? ». Pour cette situation, j’ai imaginé un test « accompagnant » que je partage avec vous. Il s’agit de répondre aux questions ci-dessous :

1. Que voudriez-vous obtenir d’un accompagnement ?

2. Imaginez que vous obteniez ce que vous voulez de l’accompagnement. Décrivez une situation où cela se verrait,

s’entendrait.

3. De quelles ressources disposez-vous en dehors de l’accompagnement pour atteindre votre objectif ?

4. Qu’est-ce qui vous empêche aujourd’hui d’atteindre votre objectif sans être accompagné?

5. Qu’est-ce qui est important pour vous dans le fait d’être accompagné ?

6. Qu’obtenez-vous actuellement de la situation que vous voulez modifiée ?

7. Qu’est-ce que vous pourriez perdre en étant accompagné vers votre objectif ?

8. Quelle serait la valeur en plus d’un accompagnement pour vous ?

9. Est-ce cohérent avec vous-même d’être accompagné ?

10. Qu’est-ce qui se passerait si vous obteniez ce que vous voulez de l’accompagnement ?

11. Quelles seraient les conséquences de cet accompagnement pour vous et pour votre entourage ?

12. Tout bien réfléchi, avez-vous besoin d’être accompagné pour réaliser ce que vous voulez ?

Jacques Abécassis

19 mars 2006 pour la revue QUALITIQUE de juin 2006


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